vendredi 19 juillet 2019

Gilbert Deleu: la disparition d’un bourgmestre emblématique

Gilbert Deleu: la disparition d’un bourgmestre emblématique
Durant 45 ans aux manettes cominoises, où il était de toutes les manifestations, Gilbert Deleu était homme de terrain, et de dossiers.
Hier, la nouvelle du décès de Gilbert Deleu, à l’aube, à l’hôpital d’Ypres, a créé la stupeur dans l’entité cominoise. Depuis le 8 janvier 2016, suite à un double AVC, il avait disparu des radars politiques, mais son ombre planait encore sur l’entité, tant il a œuvré à son développement.
Très diminué physiquement, depuis trois ans, il résidait au home Saint-Joseph, à deux pas de son cher bureau de l’hôtel de ville. Depuis l’an dernier, une pénible maladie aggravait son état de santé. Il y a dix jours, il a été admis aux soins palliatifs de l’hôpital d’Ypres. Pour nous quitter à quelques heures de sa chère fête des Marmousets.
Né à Wervicq, le 10 septembre 1943, Gilbert Deleu se présente aux élections à 22 ans, alors qu’il est responsable de plusieurs mouvements de jeunesse.
«Gilbert ne sait rien faire d’autre que d’être bourgmestre»
Échevin des sports de 1971 à 1988, il est élu bourgmestre en octobre 1988. Il dirige Comines-Warneton jusqu’au 8 janvier 2016, bien qu’il ait été le bourgmestre empêché jusqu’au 1er décembre 2018. Durant 45 ans, il aura été le cador de la gestion politique locale.
Son épouse disait avec humour «Gilbert ne sait rien faire d’autre que d’être bourgmestre», résumant une vie dévouée à «la chose publique», mais aussi et surtout à la population. Il était de toutes les manifestations, de toutes les fêtes, de toutes les réunions: rien de ce qui se passait dans la commune ne lui échappait. D’un abord assez froid, voire bourru, il était craint, mais surtout admiré pour sa perspicacité, son efficacité et sa générosité. Un bourgmestre à l’ancienne, qui gérait en bon père de famille les deniers publics.
Professeur et directeur
L’homme était d’ailleurs un amateur de chiffres. Après des études commerciales à Saint-Henri, il travaille dans un ministère à Bruxelles et entreprend une licence en sciences commerciales au cours du soir. À peine diplômé, il s’installe à Comines et devient professeur d’économie et de comptabilité à Saint-Charles Luingne et en promotion sociale, à Saint-Henri Comines, dont il assumera plus tard les fonctions de direction.
Sur le plan purement privé, sa vie a été marquée par les épreuves. Marié à Françoise Catteau, Gilbert Deleu avait deux enfants: Angélique, qui est décédée dans un accident de voiture, et Amaury, lourdement handicapé.
L’épanouissement de la personne handicapée était d’ailleurs l’un de ses principaux combats et on lui doit la création du centre d’accueil «Le Village». Ses autres chevaux de bataille privilégiés étaient l’emploi et le logement pour tous, bases de la réussite personnelle.
Jamais un jour de congé
L’homme était un bourreau de travail, une force de la nature, tant sur le plan physique que psychologique. Un bourgmestre à l’ancienne, qui nourrissait une proximité exceptionnelle avec la population.
Il ne prenait jamais un jour de congé et travaillait dans son bureau y compris les fériés. Ses importants scores électoraux témoignaient de son capital sympathie. Il restera longtemps dans nos mémoires. Ses funérailles auront lieu le samedi 27 juillet, à 10h, en l’église Saint-Chrysole à Comines.
L’émotion est vive du côté de Marie-Eve Desbuquoit, qui lui avait succédé en janvier 2016. Elle a appris la nouvelle ce matin sur son lieu de villégiature, dans le Sud de la France: «J’ai perdu un ami, un père, un confident.
Puisque ma maman travaillait à l’administration, je le connaissais depuis toute petite. Il était un monument que j’idolâtrais. Ensuite, je l’ai côtoyé en tant que directrice du centre Le Village avant qu’il ne me lance en politique, où il m’a tout appris. Pour moi, il était repère, un pilier.»
Quand on lui demande la qualité principale de l’homme, elle n’hésite pas longtemps: «Sa sensibilité. Sous sa carapace, c’était un être hypersensible, avec beaucoup de respect pour chacun. Mais c’était aussi un acharné de travail: il a vécu sa fonction de bourgmestre à 150%.»
Didier Vandeskelde était un ami très proche de Gilbert Deleu. Il a continué à lui rendre visite régulièrement après janvier 2016.
Même s’il s’attendait à la nouvelle de son décès, survenu vers 6h, il en est très affecté: «Je l’ai appris ce matin, vers 8 h.»
Dès 1977, il l’a côtoyé au sein du parti chrétien : «En 1982, je suis devenu président du parti. Nous dînions ensemble tous les vendredis. Il m’a tout appris. Je perds quelqu’un que j’aimais beaucoup. Cela me fait très mal, bien que sa mort soit une délivrance.»
En 27 ans de maïorat, Gilbert Deleu, économiste de formation, a beaucoup influé sur le développement de l’entité cominoise: «Je l’ai accompagné à Namur et ailleurs, au minimum, deux à trois fois par mois. Nous partions toute la journée et l’on était le nez dans les dossiers, sans même manger à midi. Parfois, quand un fonctionnaire n’était pas là ce jour-là, nous retournions à Namur le lendemain pour que les dossiers avancent.»
Didier Vandeskelde avait aussi appris à apprécier sa grande humanité derrière une façade bougonne: «C’était sa façon d’être, sans doute liée à son éducation. Mais, derrière, il y avait une telle générosité! Combien de fois ne l’ai-je pas vu au bord des larmes quand il était confronté à un cas de misère sociale? La misère lui pesait, surtout quand il ne savait pas agir. Aider les gens était dans sa nature.»

«Il était responsable au Patro Sacré-Cœur»

Dans les années 60, les mouvements de jeunes de l’entité étaient très diversifiés sur les diverses paroisses du doyenné de Comines.
Joseph Demuysère était responsable des Pionniers de l’unité scoute. «Il y avait une forte entente entre les mouvements. Gilbert Deleu était un des responsables du Patro du Sacré-Cœur et de la maison des jeunes paroissiale L’étincelle».
Joseph Demuysère poursuit en nous racontant une anecdote des années 70: «À la veille de partir au camp dans un pays nordique, nous n’avions pas reçu les papiers nécessaires de l’ambassade pour les scouts et le véhicule. Gilbert Deleu travaillant au cabinet des Affaires économiques, il est parvenu à avoir, en quelques heures, grâce à des collègues, les documents nécessaires pour partir au camp. » Gilbert Deleu était un artisan de la cohésion entre les initiatives au service des plus jeunes.
«On le voyait à tous les matchs de l’équipe 1re »
Gilbert Deleu était président de nombreux clubs sportifs et d’associations socioculturelles. Dans les années 60, il a pratiqué le volley.
Avant la création de l’Evoco, il jouait sur la place Sainte-Anne avec le VC Comines. Vincent Delbecque, actuel président du club de volley cominois, nous partage son émotion: «C’est une triste nouvelle pour la Ville et pour l’EVOCO. Dès le début des années 70, jusqu’à son accident vasculaire, il a été président du club. Il était présent, le samedi soir, à tous les matchs de championnat de l’équipe première. Il venait aux réunions du comité et même celles pour le calendrier des matchs ».
«Nous étions soutenus»
Ghislain Guilbert était responsable des jeunes au moment de la présidence de Gilbert Deleu: «En même temps que sa présidence, il a d’abord été échevin des Sports et ensuite bourgmestre. C’était pour nous une facilité. Nous étions soutenus positivement, notamment pour les jeunes. Pendant une dizaine d’années, la commune a proposé des stages sportifs à Thonon-les-Bains. Gilbert Deleu était présent. Je l’ai même accompagné dans sa Citroën DS. »
E.D- et M-F Ph l'avenir