La campagne «Je t’aime, je t’abîme» commence par un «Chuuut» cachant les violences conjugales et autres.
Depuis quelques semaines, des photos de Cominois apparaissent sur les réseaux sociaux de manière singulière. Les 21 clichés en noir et blanc montrent des visages avec le doigt devant la bouche pour faire «chuuut». Les associations de la plate-forme d’éducation permanente (PCS-EP) ont choisi, pour cette saison culturelle, la thématique des violences conjugales.
Cette campagne porte le nom «J’aime, je t’abîme». Les photos «chuuut» sont une des premières actions.
185 PV de violences conjugales
Marie-Aude Breyne animatrice au Centre culturel est la coordinatrice de ce projet: «Chuuut est le besoin conscient ou inconscient de taire les violences subies. Taire parce que c’est tabou, honteux, intime, personnel ou taire tout simplement parce que l’on trouve cela normal, banal, quotidien, etc. Nous sommes tous concernés, peu importe l’âge, la profession, le sexe, le milieu social. En 2018, la police cominoise a rédigé 185 PV de violences conjugales.»
«Chuuut!» se décline en deux phases. Les photos d’une vingtaine de Cominois connus se retrouvent sur les réseaux sociaux. Et depuis quelques jours, la seconde étape consiste en l’affichage de mises en scène avec les mêmes personnes.
Des bâches évoquent, en différents lieux de l’entité, des types de violences: administratives, financières, physiques, psychologiques, sexuelles.
«Un des objectifs de la campagne est de montrer toute la complexité du sujet, poursuit Marie-Aude. Le but n’est certainement pas de choquer mais surtout d’inviter à la réflexion. C’est aussi mettre en lumière ce phénomène tabou.. surtout permettre à chacun de se questionner sur son rapport aux violences conjugales et autres».
«Ces relations qui font mal»
Plusieurs photographes et maquilleuses bénévoles se sont mobilisés pour cette cause. La campagne sera aussi marquée par une conférence/débat: «Ces relations qui font mal, parlons-en!» Le jeudi 24 octobre à 20 h, à la MJC, la Plate-forme Education Permanente de la Ville de Comines-Warneton accueillera Éric Delhaye, Procureur du Roi de l’arrondissement judiciaire Mons-Tournai, spécialisé dans ce domaine, ainsi que Véronica Saldi travaillant à la Maison d’accueil solidarité femme de la Louvière. Suite à la conférence, un cas fictif sera analysé par des spécialistes locaux.
La Plate-forme Education permanente a organisé une première soirée autour du thème de la violence intraconjugale.
«Travailler en réseau»
Le mot d’accueil prononcé par Caroline Provoost de l’Assistance policière aux victimes situe d’emblée le propos: «Nous avons tous droit au respect dans nos relations».
Éric Delhaye, procureur du roi de l’arrondissement judiciaire Mons-Tournai, division Tournai, a apporté la vision de la justice: «La nécessité est de travailler en réseau pour les violences intrafamiliales qui ne sont pas que physiques. La réaction est difficile pour la justice qui doit établir la réalité des faits à partir des procès-verbaux de la police. Nous avons à nous interroger sur le sens à donner à l’intervention judicaire ».
Véronica Saldi travaille à «Solidarité Femme» de la Louvière, qui accueille des femmes victimes de violences et aux Pôles ressources, dispositif wallon de lutte contre les violences entre partenaires. Elle situe d’abord le lieu d'«écoute des violences familiales» (0800 300 30) qui a reçu 4802 appels en 2017 (94% de femmes).
«Nous adoptons quatre clefs de lecture pour distinguer les violences intraconjugales et les conflits: les intentions des agresseurs, les explications données par l’agresseur, l’impact sur la victime et surtout la répartition et la diversification des agressions».
Le programme à venir
Durant la partie réservée au débat, la bourgmestre Alice Leeuwerck a mis en évidence «le sentiment de réconfort qui vient de cette diversité de points d’écoute avec différentes structures que l’on peut aborder localement. Le travail en réseau pourrait donner une complexité des interventions».
Durant les mois à venir, le programme concocté par la Plate-forme Education permanente de la Ville est riche et varié. Une partie sera centrée sur les acteurs de terrain sous forme de formations. Pour un public plus large, il y aura la pièce de théâtre «Cinglée» (23 nov.), l’opération Ruban blanc (25 nov.), une rencontre avec Julie Bodelot (19 février), un film intitulé «Jusqu’à la garde» (15 avril), le concours de poésie (4 juin) et l’expo «Chuut».
Édouard DEBELDER - L'Avenir
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